Des meubles fabriqués à partir de coffrages
L’agence de design NiceWorkshop a créé du mobilier recyclé pour la marque Format, entièrement fabriqué à partir des coffrages utilisés pour couler le béton lors de la construction des…
L’exposition d’automne du Centre Pompidou, Bacon en toutes lettres, revient sur les vingt dernières années de vie du peintre britannique. Il est important d’avoir deux éléments en tête avant de se rendre à cette exposition. Tout d’abord une modalité pratique : à cause des travaux du Centre, il est obligatoire de réserver son billet à l’avance.
Ensuite, il faut savoir qu’il ne s’agit pas d’une exposition monographique et qu’au contraire le parti-pris peut sembler radical voire déconcertant. Un seul texte de salle nous accueille et présente le propos de l’exposition : six ouvrages, poétiques, littéraires et philosophiques, qui appartenaient à Francis Bacon, sont mis en relation avec les peintures qu’il a produites à la fin de sa vie, entre 1971 et 1992. Nous sommes pourtant avertis d’emblée que le peintre a toujours refusé l’impact des sources littéraires sur son oeuvre et toute interprétation narrative de ses peintures, et ce même s’il était un grand lecteur. Cet unique texte de l’exposition, attire également notre attention sur le fait que les œuvres que nous allons voir sont différentes de celles qui ont fait la renommée de Bacon puisqu’il a, à la fin de sa vie, vécu une véritable mutation artistique. L’année 1971 marque en effet une rupture dans sa vie personnelle et artistique: son compagnon se suicide dans leur chambre d’hôtel parisienne seulement deux jours avant l’inauguration de l’importante rétrospective que le Grand Palais lui consacre, honneur rare pour les artistes vivants, qui le hisse au rang de Picasso.
Nous sommes ensuite livrés face à nous-mêmes, ou plutôt face aux œuvres, sans aucun texte exceptés les cartels techniques. Autour d’un couloir central, les six parties de l’exposition se répondent. D’un côté les œuvres, toutes d’un format quasi identique, sont présentées presque au ras du sol, dans les cadres dorés que Bacon avait choisis, sur des cimaises d’un blanc immaculé. De l’autre côté, de petites pièces sombres aux allures de cube sont ménagées. A l’intérieur, les murs y sont complètement nus, à l’exception du livre mis en exergue dans une vitrine, tandis qu’en fond sonore, la voix d’un comédien en récite un court extrait. En sortant de ces espaces obscurs, nous ne pouvons pas manquer d’être éblouis par la force des couleurs de Bacon qui se détachent face à nous et nous entourent. A la puissance des mots, répond l’intensité des œuvres. Les textes choisis ne veulent pas illustrer les sujets représentés, ils veulent dégager la même énergie, la même audace, le même instinct. Sur la toile, les corps se tordent et se tendent, les formes se déforment et s’estompent, les couleurs sont saturées et vives, tandis que dans notre tête, les textes résonnent portés par les voix puissantes.
Il est possible de se satisfaire de ce choc visuel, de profiter des œuvres exceptionnellement réunies : beaucoup n’ont jamais été montrées en Europe, ou appartiennent à des collectionneurs privés. Pour un public habitué des expositions, il peut même être intéressant de se confronter à une oeuvre sans filtres, sans a priori et de prendre le temps de regarder et de se laisser submerger sans chercher à lire et à comprendre. Les tableaux de Bacon sont par leur force singulière parmi les plus à même de permettre ce genre d’exercice.
Cependant il peut être également difficile d’apprécier pleinement cette exposition. Le manque de pédagogie et de propos est déroutant d’autant plus que la problématique soulevée en préambule est complexe. On ne perçoit pas toujours les liens entre les œuvres et les textes et il est frustrant de ne pas saisir pleinement la pensée du commissaire d’exposition. Puisque le propos annoncé est sur le registre du cérébral et de l’intellectuel plus que du sensible, une médiation plus soutenue aurait été la bienvenue. S’il n’est pas toujours nécessaire de contextualiser une oeuvre pour la comprendre, certaines informations peuvent nous éclairer et nous permettre d’apposer un regard différent sur elle. Ainsi la dernière oeuvre présentée dans l’exposition a été laissée inachevée par Bacon au moment de sa mort, mais cela n’est pas précisé. La composition et les couleurs apparaissent alors différemment lorsque l’on sait que seul le temps a manqué au peintre de 82 ans pour achever cette toile.
Le Centre Pompidou propose un podcast à écouter avant la visite qui nous apporte plus d’informations. Il est également possible de feuilleter le catalogue qui pousse la réflexion un peu plus loin… une manière de retourner à l’écrit et de boucler la boucle.
Bacon en toutes lettres, Centre Pompidou, 11 septembre 2019 – 20 janvier 2020.
Article rédigé par Amélie Hautemaniere – Photos de l’auteur
Suivez notre compte Instagram « myarchibat » pour découvrir de nouvelles expériences artistiques et architecturales !