Des fleurs en métal expriment la relation entre humanité et nature
L’exposition « Zadok Ben-David : réserve naturelle » se déroule dans les jardins de Kew au Royaume-Uni jusqu’au 24 avril. Elle explore la fragilité croissante de la nature…
Toulouse-Lautrec fait partie de ces artistes que l’on pense connaître et qu’on ne prend plus la peine de découvrir. Le Grand Palais nous propose de s’intéresser à son œuvre, en oubliant nos préjugés. Cette exposition a pour ambition de dépasser la vision réductrice qui s’est imposée de Toulouse-Lautrec comme peintre de Montmartre, peintre des maisons closes et des débits de boisson, ou encore artiste à la vie dissolue. En effet Toulouse-Lautrec n’a pas cherché seulement à représenter le monde de la nuit, mais il a voulu retranscrire la réalité de la société contemporaine sur lequel il pose un regard parfois lucide, parfois tendre, parfois féroce, parfois drôle, parfois mélancolique… Le parcours de l’exposition suit celui de l’artiste en ménageant des sections plus thématiques. La scénographie est sobre, elle s’efface complètement derrière les œuvres. Œuvres qui nous réservent beaucoup de surprises : la maitrise du dessin et du trait, la capacité unique à retranscrire le mouvement et l’effervescence, la force des couleurs,…
Entraînés dans le tourbillon des œuvres, on ne voit pas arriver la fin de cette exposition, qui est brutale comme la disparition de Toulouse-Lautrec victime d’une hémorragie cérébrale, à l’âge de 36 ans.
Le musée Jacquemart met à l’honneur une sélection de la collection Alana : 75 œuvres sur les 400 que comportent cette collection privée, dédiée à la peinture italienne du XIIIème au XVIIème siècle sont présentées pour la première fois au public. Cet ensemble appartient à Àlvaro Saieh et Ana Guzmán, couple chilien dont les prénoms réunis donnent le nom à la collection. Comme souvent au musée Jacquemart-André, c’est un fond de collectionneur qui est mis en valeur, pour faire écho à l’histoire du lieu et à la collection de Edouard André et de Nélie Jacquemart.
La première salle reprend l’accrochage foisonnant caractéristique des scénographies des musées au XIXème siècle et qui est la présentation choisie par le couple pour la conservation de leur collection à New-York, comme l’atteste quelques photographies. Dans les salles suivantes, un accrochage plus classique a été privilégié. Les toiles des grands maîtres italiens défilent devant nos yeux : Lorenzo Monaco, Fra Angelico, Uccello, Lippi, Bellini, Carpaccio, Tintoret, Véronèse, Bronzino ou Gentileschi,… Loin d’une logique d’acquisition froide et calculée, le couple fonctionne au coup de coeur et s’ils privilégient la Renaissance, ils n’hésitent pas à faire des incursions vers des mouvements plus tardifs, par amour de la peinture.
Ce condensé de la peinture gothique et Renaissance est intelligemment mis en valeur. Nous découvrons les évolutions techniques et stylistiques, les changements de mode et de goût, l’influence des pouvoirs politiques et religieux, notamment à Florence entre la main-mise du prédicateur Savonarole, le retour au pouvoir des Médicis et l’impulsion papale.
Le musée d’Orsay explore la relation unique et très privilégiée entre Edgar Degas et l’Opéra, entre l’artiste et son modèle favori. Degas a été très jeune sensibilisé à la musique : son père était un amateur érudit qui tenait salon, et invitait des chanteurs, compositeurs,… Il entraîne son fils dans les coulisses de l’Opéra et des théâtres. Degas ne les quittera plus : de ses débuts à ses dernières toiles, l’univers de l’Opéra est présent. Il en représente les différents espaces (salle et scène, loges, foyer, salles de danse), et ceux et celles qui les habitent (danseuses, chanteurs, musiciens, spectateurs, abonnés,…), à différents moments de la journée. Avec l’Opéra comme laboratoire, il expérimente et s’amuse : multiplicité des points de vue, jeux de cadrage, obstruction de la perspective par un personnage de dos ou coupé à mi-corps, fort contraste des éclairages, décomposition du mouvement, représentation de l’effort et de la perte de l’individualité des corps. Il décline les motifs grâce à des techniques et supports variés, s’amusant de la sobriété du noir et blanc, ou laissant éclater les couleurs, notamment à la fin de sa vie lorsqu’il privilégie le pastel pour ne pas être limité par sa cécité naissante. L’exposition rassemble beaucoup d’œuvres jamais exposées au public ou appartenant à des musées américains.
Les carnets de Degas sont également exposés, ceux qui lui assuraient un répertoire de motifs, lorsqu’il ne pouvait plus assister aux représentations – lors de l’incendie de l’Opéra Le Peletier ou à la fin de sa vie notamment.
Degas utilise également le microcosme de l’Opéra pour dresser une critique sociale de son temps. et au-delà de ses oeuvres, des évolutions de sa techniques, c’est la société de la fin du XIXème siècle qui défile devant nos yeux sur les cimaises d’Orsay.
Le Petit Palais s’est associé au Museo e Real Bosco di Capodimonte de Naples pour nous proposer une saison consacrée à l’art napolitain. L’occasion de découvrir l’attachant sculpteur de la fin du XIXème siècle, Vincenzo Gemito. Le parcours est chronologique et retrace la vie romanesque de l’artiste. Enfant des rues, autodidacte, il se forme en modelant le portrait de ses amis et du petit peuple napolitain. Repéré jeune, il entre à l’Académie à 12 ans. A 17 ans, son Joueur de cartes lui assure le succès. A 21 ans, il reçoit entre autres, la commande du buste du compositeur Verdi. A 25 ans, il choque le milieu parisien en présentant une œuvre trop réaliste à l’Exposition Universelle, loin des standards attendus de la beauté classique italienne et bien loin de l’art pompier qui avait les faveurs du public parisien. Il contribuera cependant à assoir le réalisme en sculpture, aux côtés de Rodin qu’il côtoie. Il rencontre à Paris son premier amour et muse dont de nombreux portraits sont présentés dans l’exposition. Avec le succès viennent des commandes de plus en plus prestigieuses et la pression que Gemito y associe, le font sombrer dans la folie.
L’exposition présente à la fois son talent de sculpteur et sa maitrise du dessin. Son art est tendre et vulnérable, puissant et à fleur de peau, émouvant et vibrant, réaliste et gracieux. C’est une belle découverte que nous propose le Petit Palais, une rencontre marquante avec un artiste oublié mais pourtant incontournable.
L’exposition de l’Orangerie ne nous présente pas un artiste ou un mouvement, mais un critique d’art, Félix Fénéon. On a pu déjà avoir un aperçu l’été dernier de cette personnalité marquante, du milieu culturel du tournant du XXème siècle, au musée du Quai Branly qui s’était penché sur sa collection d’oeuvres africaines et océaniennes.
L’exposition de l’Orangerie, organisée en quatre sections et trois focus, s’intéresse aux engagements de Félix Fénéon. Anarchiste, critique d’art, rédacteur, éditeur, directeur de galerie, collectionneur, dandy, les facettes de Fénéon sont aussi nombreuses que ses centres d’intérêt. Sa personnalité est passionnante et attachante. Il collabore à de nombreuses revues littéraires et artistiques, il dirige une galerie, il collectionne, il soutient les artistes comme Toulouse Lautrec, Gide, Claudel, Bonnard, Vuillard, Gauguin, Matisse ou les Futuristes italiens,… Il découvre Seurat et invente pour lui le terme de « néoimpressionniste ». Fénéon faisait aussi preuve de profondes convictions anarchistes et il est passionnant de se plonger dans les archives du contexte social tourmenté social de la fin du siècle.
Le rôle de Fénéon sur la scène artistique du début du XXème siècle fut déterminant. L’exposition de l’Orangerie le présente brillamment et on ne boude pas son plaisir face aux œuvres réunies.
Le musée des arts décoratifs nous invite à rencontrer le fascinant maharajah d’Indore, Yeshwant Rao Holkar II (1908-1961), souverain d’un des plus riches États de l’Inde. Dès les années 1920, il est envoyé très jeune faire ses études à Oxford en Angleterre. Son précepteur francophone le sensibilise à la culture européenne. Il lui présente l’architecte berlinois Eckart Muthesius, proche de l’avant-garde, et Henri-Pierre Roché, conseiller artistique et écrivain. Ces deux hommes aiguilleront son goût pour l’art moderne. En Europe, Yeshwant Rao Holkar II fréquente les salons, expositions et ateliers d’artiste. Il partage sa passion pour la création contemporaine avec sa femme, la maharani Sanyogita Bai Devi, qui a aussi étudié en Angleterre, fait rare pour une femme. En 1929, ils décident d’ériger un palais dans leur Inde natale, alliant luxe et confort, tradition et modernité. Le couple confie ce projet à Eckart Muthesius. L’exposition met en lumière cette demeure mythique et les objets qui l’habitaient. En effet si les premières salles s’intéressent à la personnalité du couple, aux premières collaborations qu’ils mènent avec Muthesius et à la genèse du projet, une grande partie de l’exposition est consacrée à la décoration intérieure du palais de Manik Bagh. Les différentes pièces prennent vie devant nos yeux.
Le métal, le cuir synthétique et le verre sont les matériaux privilégiés. Une vingtaine de créateurs français et allemands sont sollicités comme Louis Sognot et Charlotte Alix, Jean Puiforcat, Eileen Gray ou encore Le Corbusier. Dans le contexte difficile de l’après-1929, les artistes anticipent même les goûts du maharajah espérant une commande de sa part.
Le maharajah marque de son empreinte les arts de son temps. Tous les arts décoratifs sont représentés. A la mort prématurée de la maharani, le palais est délaissé.
Cette exposition permet de poser un nouveau regard sur la création des années 30, de découvrir la personnalité du jeune maharajah et d’admirer des œuvres longtemps restées confidentielles.
Le Jeu de Paume nous entraîne dans le tourbillon de New York avec le photographe Peter Hujar (1934-1987) comme guide. L’exposition suit le parcours d’Hujar. Jusqu’en 1972, il travaille dans le milieu de la mode, comme assistant de photographes publicitaires d’abord puis pour des magazines de mode. Il se détache de ce milieu pour pouvoir se consacrer à ses propres recherches photographiques. Il vit alors dans le plus grand dénuement, ne travaillant que lorsque cela est nécessaire. Il s’installe dans le quartier de l’East Village au dessus d’un théâtre et côtoie des personnalités atypiques, danseurs, travestis, plasticiens, musiciens,… dont il fait le portrait.
Le premier grand ensemble de l’exposition présente les différents aspects de sa pratique photographique : le portrait en atelier, la représentation du corps nu, puis la ville de New York. La deuxième section est inspirée par l’accrochage de la dernière exposition newyorkaise qu’Hujar eu de son vivant, en 1986, à la Gracie Mansion Gallery. Les photographies sont exposées en série, sans ordre apparent, les images n’ont rien en commun si ce n’est la continuité stylistique. Elles forment un étrange panorama où chaque œuvre est rendue à son unicité et à sa singularité.
Peter Hujar nous propose une photographie de l’intime dépourvue de sentimentalisme, une représentation des corps brute sans idéalisation, un portrait vibrant du New York underground et nous permet d’apercevoir en filigrane l’évolution du regard posé sur la communauté gay entre les émeutes de Stonewall en 1969 et la crise du Sida dans les années 1980, maladie dont l’artiste décède en 1987.
Article rédigé par Amélie Hautemaniere
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